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Bienvenue sur ce blog !
 
Vous allez pouvoir plonger dans le monde des Lettres. Comme il n'est pas de littérature, quels que soient le pays et l'époque, hors du temps, vous pourrez aussi trouver des points de repères dans différents domaines : histoire, peinture, sculpture, musique, architecture, et tant d'autres encore…
 
Une place accordée aux nouveautés de tous pays ne fera pas oublier les textes plus anciens, voire très anciens. Vous pourrez découvrir ou redécouvrir non seulement les textes de l'Antiquité mais aussi ceux du Moyen Age. Les époques suivantes ne sont pas laissées de côté. Au milieu des textes devenus des classiques –comme le veut la formule- vous ferez peut-être d'heureuses découvertes… Vous voyagerez, je l'espère, ici et là dans des univers auxquels vous n'aviez pas encore songé…
 
Vous trouverez aussi des informations sur la langue française. Il ne s'agit pas d'un travail universitaire, mais simplement d'éléments qui permettent de rendre compte des différents états d'une langue.
 
Si vous avez envie de poursuivre, alors venez papillonner et j'espère que vous trouverez votre bonheur et que l'envie de lire sera au rendez-vous !
 
Je vous invite à partager tout cela !

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7 mai 2010 5 07 /05 /mai /2010 10:55

Source

 

QUIROGA Horacio, Contes d'amour, de folie et de mort, Éditions Métailié, Coll. Suites, 2000

 

 

L'Insolation

"Old, le chiot, sortit par la porte et traversa la cour d'un pas droit et paresseux." Il s'installa et observa les alentours. Tout était calme. "Pas un nuage, pas un souffle de vent."

Milk, le père, alla retrouver son chiot et s'assit à ses côtés. Old continuait d'observer l'orée du bois qu'il regardait depuis un moment.

 

Il estimait que la matinée était fraîche. Milk, quant à lui, observait deux faucons dans un arbre.

 

Le regard des chiens se portait ici ou là.

 

"Cependant le ciel à l'orient commençait de s'empourprer et l'horizon avait déjà perdu sa netteté matinale." Puis le soleil se leva. D'autres chiens vinrent rejoindre Old et Milk. Les cinq fox-terriers finirent par s'endormir.

 

"Au bout d'une heure ils levèrent la tête." Leur maître se déplaça dans la maison. Les chiens le reconnurent à sa démarche. L'homme "avait encore le regard mort et la lèvre pendante, après une veillée solitaire au whisky plus prolongée que de coutume."

 

Les chiens s'approchèrent de lui un instant, puis s'installèrent dans les couloirs. Il faisait toujours chaud comme habituellement à cette saison.

 

M. Jones, le propriétaire des chiens, se rendit dans les champs. Tandis qu'il faisait la sieste l'après-midi, les péons vinrent travailler aux champs. Les chiens leur tinrent compagnie. La chaleur était toujours aussi forte et les chiens toujours allongés. Devant une petite étendue de terre, le "chiot vit soudain mister Jones qui le regardait fixement assis sur un tronc. Old se leva en remuant la queue. Mais les autres, qui se levèrent aussi, avaient le poil hérissé."

 

Le chiot, "surpris par l'attitude des autres", ne comprit pas ce qui arrivait. Ce fut Prince qui lui annonça que ce n'était pas son maître qu'il avait vu mais la Mort. Puis mister Jones disparut.

 

Comme les chiens continuaient d'aboyer, les péons regardèrent, dans leur direction, sans rien voir.

 

Sur le chemin qui conduisait les chiens à la ferme, le jeune chiot" apprit de l'expérience de ses compagnons que quand une chose va mourir, elle apparaît d'abord."

 

Les chiens restèrent tout l'après-midi auprès de leur maître, attentifs au moindre bruit, ce qui rassura leur maître.

 

La nuit tomba. Les chiens se placèrent autour de la maison, leur maître au premier étage. Les chiens, sentant sa mort approcher, se lamentaient  sur leur sort. Ils auraient fatalement un autre maître, mais comment serait-il ?

 

Le lendemain matin, mister Jones travailla, sans être satisfait de ce qu'il avait accompli, sa herse étant en mauvais état.

 

À midi, après avoir donné quelques consignes au péon, il alla déjeuner et fit la sieste. Les chiens étaient toujours là.

 

La chaleur était accablante. Les chiens, tout en se reposant, constatèrent que leur maître n'avait pas reparu. Les chiens continuaient d'observer. Enfin leur maître revint au même moment que le péon et le cheval.

 

La mort, que les chiens avaient perçue, venait de prendre le cheval que le péon avait fait courir sous cette chaleur. Ce fait rassura les chiens.

 

Cependant mister Jones dut retourner en ville car il manquait une vis pour sa herse. Le chemin fut éprouvant à cause de la chaleur. Il eut des vertiges.

 

Dès que les chiens le virent, ils comprirent que le sort de leur maître était scellé. Mister Jones s'écroula et mourut. La propriété fut vendue par le demi-frère de mister Jones. Chaque péon prit un chien "qui [vécut] dès lors maigre et galeux et [alla] en secret chaque nuit, affamé, voler des épis de maïs dans les fermes voisines."

 

 

 

Les barbelés

 

L'alezan ne parvenait pas à comprendre quel était le chemin par lequel son compagnon s'échappait. Puis un jour, le vieil alezan "trouva très simplement la brèche." Il put enfin suivre le chemin qui le menait jusqu'à la forêt et retrouver son compagnon.

 

Les deux chevaux étaient libres mais dans leur marche, une nouvelle clôture les arrêta. Alors ils passèrent la tête par dessus. De là ils virent "un haut pâturage sur un ancien essart, blanc de givre ; une bananeraie et des plantations nouvelles." Ils parvinrent à passer cette clôture puis la suivante. Le sentiment de liberté était immense car ils n'avaient connu que l'enclos.

 

Leurs pas les conduisirent jusqu'à un troupeau de vaches. Une discussion s'engagea durant laquelle les chevaux apprirent que seul le taureau était capable de franchir une clôture. Les chevaux réalisèrent soudain qu'il existait une différence entre eux et le taureau. Cependant le taureau eut beaucoup de mal avec la clôture car "le fermier, heureux propriétaire du champ d'avoine, avait assuré […] sa barrière avec des coins."

 

Le taureau parvint toutefois à la franchir mais s'égratigna un peu le dos et se vit forcer, par le fermier voisin, de bouger. Le taureau n'obéit pas longtemps, il "enfonça sa tête entre les fils et traversa dans le grincement des fils de fer et des crampons qu'on lui lançait à vingt mètres de là."

 

Tout ceci eut lieu sous les yeux des chevaux qui "retournèrent par le chemin vers leur champ." Les chevaux suivirent l'homme qui se rendait dans la "ferme du propriétaire du taureau."

 

Les chevaux entendirent la conversation des deux hommes. Le fermier ne parvenait plus à supporter les nombreux pillages de ce taureau qui appartenait à un Polonais, quelque peu sournois.

 

Le fermier annonça qu'il allait mettre des barbelés, ce qui n'impressionna pas le Polonais.

 

Les chevaux, quant à eux, retournèrent "à l'endroit où Barigüi [le taureau] avait accompli sa prouesse." L'animal était toujours là.

 

Quand les vaches aperçurent les chevaux, elles les méprisèrent. Les chevaux vinrent leur annoncer que le taureau ne pourrait plus passer. Si les vaches n'y crurent pas, les chevaux estimèrent que l'homme construirait quelque chose d'infranchissable.

 

Alors qu'ils continuaient de marcher, les chevaux aperçurent le fermier "qui changeait tous les piquets de la clôture et un homme blond, arrêté à côté de lui sur son cheval, qui le regardait travailler."

 

Le fermier persista, le taureau ne passerait plus.

 

Les chevaux poursuivirent leur balade et "rentrèrent dans leur champ par le portail."

 

Le lendemain, les chevaux "renouvelèrent leur escapade." Ils arrivèrent non loin du pré des vaches. Ils voulurent voir la nouvelle clôture faite de "deux simples fils de fer barbelés, gros peut-être, mais seulement deux" et de piquets peu espacés.

Les chevaux doutèrent  de l'efficacité de ces barbelés malgré les paroles entendues la veille.

Les vaches aperçurent les chevaux. Le taureau, qui mangeait l'avoine étant passé par derrière, expliquèrent les vaches, mais il pourrait passer ces barbelés au fil très tendu ajoutèrent-elles.

 

Tout à coup, le fermier sortit de chez lui et se dirigea vers le taureau. Le fermier, bien qu'armé d'un bâton, semblait serein. Le taureau fonça sur le fermier et passa la clôture, mais "de son dos et son ventre déchirés, par une tranchée profonde de la croupe au poitrail, pleuvaient des fleuves de sang." Le taureau finit par s'effondrer. Le Polonais dut l'abattre.

 

"Le lendemain [l'un des chevaux] eut le privilège de rapporter, dans ses sacoches, deux kilos de la viande du taureau mort."

 

FIN DE LA QUATRIÈME PARTIE

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10 février 2010 3 10 /02 /février /2010 10:13

Source

 

QUIROGA Horacio, Contes d'amour, de folie et de mort, Éditions Métailié, Coll. Suites, 2000

 

La mort d'Isolde

Un narrateur, assiste à un spectacle : Tristan et Isolde.

 

À la fin du premier acte, il fut attiré par un couple. Il observa surtout la femme.

 

Alors que le deuxième acte commençait, son regard et celui de la jeune femme se croisèrent. La jeune femme fut quelque peu troublée mais le narrateur se méprenait. La jeune femme regardait son voisin. Il ne faisait aucun doute qu'ils se connaissaient.

 

D'ailleurs, vers le milieu de l'acte, tous deux se regardaient. Puis pendant le troisième acte, le voisin du narrateur sortit. Le narrateur remarqua que la jeune femme n'était plus dans sa loge.

 

 

 

Un homme évoque Tristan à la personne qui se trouve non loin de lui. Il lui raconte un fait qui peut le concerne.

 

Cet autre narrateur, Esteban, avait fréquenté il y a dix ans, cette jeune femme aperçue dans la loge. Dès qu'ils purent être l'un à l'autre, le jeune homme se lassa. Cependant, quand il songea à rompre avec elle, il eut du mal.

 

Un soir, alors qu'il semblait déterminer à rompre, il se rendit chez la jeune femme, prénommée Inès. Cette dernière, toujours amoureuse, comprit rapidement que quelque chose n'allait pas. Tous deux parlèrent.

 

Bien qu'il lui donnât le sentiment d'être dur envers elle, Esteban éprouva un profond malaise. Néanmoins, il parvint  rompre tout en réalisant qu'il avait "avili en une seconde l'amour le plus pur qu'aucun homme eût reçu et [qu'il venait] de perdre, avec Inès, l'irremplaçable bonheur de posséder celle  vous a aimé du fond du cœur."

 

Il s'apprêtait à partir,  tandis qu'elle pleurait. Il tenta quelques mots mais il était trop tard.

 

 

 

"Padilla s'arrêta." Le premier narrateur, qui l'avait écouté, n'avait sous les yeux que "l'image de cette tête adorable de la loge, sanglotant sur le canapé."

 

Après sa rupture, Padilla avait quitté Buenos Aires. Quand il y revint, huit ans plus tard, il apprit "qu'elle s'était mariée six mois après [son] départ." Il quitta alors une fois encore la ville puis y revint plus serein mais sans avoir oublié ce premier amour.

 

Lorsqu'il croisa son chemin, en se rendant à l'opéra, il sentit "qu'en [son] âme, assoupie dans la paix, surgissait, sanglante, la désolation de l'avoir perdue, comme si ces dix années n'avaient été qu'un jour."

 

Padilla essaya, le temps de la représentation, de la chasser de sa mémoire. "Mais la prodigieuse partition de Wagner, ce cri de passion maladive enflamma comme une torche vive ce qu'[il] voulai[t] oublier." Il ne put y parvenir. L'opéra de Wagner exerçait une influence dont ni lui, ni elle ne parvenaient à se départir.

 

Il quitta sa place et se rendit dans le couloir pour être plus près d'elle. Soudain, en passant devant sa loge, il éprouva les mêmes sentiments que dix ans plus tôt. Il s'adressa à Inès et "comme dix ans plus tôt, les sanglots redoublèrent et comme alors elle [lui] répondit, la tête entre ses bras :

- Non, non… C'est trop tard !..."

 

 

À la dérive

À peine eut-il marché sur quelque chose de mou qu'il ressentit sur le champ une morsure à son pied. Un yararacusu (un serpent) venait de le mordre. Une couleur intense envahit peu à peu le pied. Il parvint à regagner sa cabane et s'effondra sur la roue du moulin à sucre.

 

Son état s'aggrava. "La soif le dévorait." Il but ce que sa femme lui apporta mais rien n'y fit. Toute sa jambe le faisait souffrir. Il fut pris de vomissements. "Mais l'homme ne voulait pas mourir et descendant jusqu'à la berge, il monta dans son canot."

 

Le courant du fleuve  Parana devait le mener jusqu'à Tacuru-Pucu en quelque cinq heures.

 

Dorénavant sa jambe "n'était plus qu'un bloc difforme et très dur qui crevait le vêtement." Il réalisa alors qu'il ne pourrait "jamais atteindre Tacuru-Pucu, et il se décida à demander de l'aide à son compère Alvès, bien qu'ils fussent brouillés depuis longtemps."

 

Pourtant il parvint à atteindre le rivage. Après avoir fait quelques mètres sur le sentier, il s'écroula. Il appela Alvès, mais il n'eut que le silence. Péniblement, il regagna son canot que le courant emporta.

 

"Là le Parana, encaissé au fond d'une fosse immense, entre des parois hautes de cent mètres, coule funèbrement." Le paysage est hostile.

 

À la tombée de la nuit, l'homme, "à demi étendu au fond de sa barque, eut un violent frisson." Il se sentit un peu mieux et avait moins mal.

 

Il attendit quelques heures, car il voulait se rendre à Tacuru Pucu. Y verrait-il ses anciens compagnons ?

 

Le canot continua de dériver. L'homme, qui se sentait de mieux en mieux, songeait à ceux qu'il allait retrouver en arrivant.

 

"Soudain, il sentit qu'il était glacé jusqu'à la poitrine." Il eut une dernière pensée puis cessa de respirer.

 

 

FIN DE LA TROISIÈME PARTIE

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1 février 2010 1 01 /02 /février /2010 10:05

QUIROGA Horacio, Contes d'amour, de folie et de mort, Éditions Métailié, Coll. Suites, 2000

 

Le Solitaire

Kassim, homme maladif, était un bijoutier qui n'avait pas son pareil dans le montage des pierres précieuses.

 

Cet homme de trente-cinq ans "continuait à travailler dans sa chambre, aménagée sous la fenêtre en atelier."

 

Il avait épousé une jolie fille qui avait aspiré à un mariage plus avantageux. Il n'en fut rien.

 

Le jour quand il travaillait, elle le regardait faire, se laissant distraire parfois. Pourtant tout ce que son mari gagnait, était pour son épouse. Il travaillait de longues heures pour pouvoir lui donner ce qu'elle désirait.

 

"Peu à peu, la fréquentation quotidienne des pierres précieuses finit par lui faire aimer le travail de l'artisan, et elle suivait avec ardeur les intimes délicatesses du sertissage."

Mais lorsque le bijou achevé, était donné à son propriétaire, elle sombrait dans une dépression et restait inconsolable. Elle adressait à son mari des remarques blessantes.

 

"Ces nuits-là Kassim travaillait jusqu'à trois heures du matin, et sa femme y gagnait de nouveaux éclats de diamant qu'elle considérait un instant, les lèvres pincées." Mais cela ne lui convenait pas car elle n'aimait que "les pierres volumineuse que Kassim montait."

 

Maria regardait son homme travailler, lui reprochant de ne jamais faire de sacrifice pour la gâter.

 

Un jour, Maria fut plus insupportable que d'autre. Elle porta, pour sortir, une broche "-deux solitaires de cinq mille pesos" que son mari cherchait partout.

 

Quand elle revint à la maison, Kassim la lui prit et la "rangea sous clé dans son atelier." Son mari lui reprocha son imprudence. Peu après, "on confia ensuite à Kassim un solitaire à monter, le brillant le plus admirable qu'il ait eu entre les mains." Kassim devait monter une épingle.

 

Tandis qu'il montait un solitaire, Maria n'arrêtait pas de l'interrompre dans son travail.

 

Elle jeta violement le solitaire qu'elle avait essayé sur un vêtement. Kassim le ramassa puis se remit au travail. Au bout d'un moment, il finit par aller voir sa femme, "en pleine crise de nerf." Elle lui reprocha d'avoir volé sa vie.

 

Au bout d'un moment, elle parvint à se calmer. Kassim retourna alors au travail.

 

Il lui avait fait croire qu'elle aurait ce bijou. Apaisée par cette promesse, elle s'endormit. Quand Kassim, eut achevé le bijou, il alla voir son épouse dans la chambre. "Il contempla un instant le sein presque découvert et, avec un pâle sourire, écarta un peu plus la chemise dénouée. Puis, "le visage de Kassim prit soudain une dureté de pierre et, effleurant un instant du bijou le sein dénudé, il enfonça fermement, droit comme un clou, l'épingle entière dans le cœur de sa femme."

 

Elle se réveilla soudainement. "Ses doigts se recroquevillèrent et ce fut tout." Alors Kassim quitta la chambre "en fermant la porte derrière lui sans faire de bruit."

 

 

L'Oreiller de plumes

 

Un jeune couple, marié depuis peu, goûtait à son bonheur. Même si la jeune mariée estimait que son mari avait un caractère dur, Jordan aimait beaucoup Alicia, mais ne laissait pas paraître tout l'amour qu'il éprouvait pour elle.

 

Leur maison était tout en blancheur. "Dedans, l'éclat glacial du stuc, sans la moindre égratignure sur les hauts murs, accentuait cette sensation de froid inquiétant."

 

Cependant, Alicia vécut là tout l'automne, "endormie dans la maison hostile, sans vouloir penser à rien jusqu'à l'arrivée de son mari."

 

Soudain, elle maigrit, puis tomba malade et ne parvint pas à se rétablir vraiment. Toutefois, un après-midi, elle réussit à faire quelques pas dans le jardin aux bras de son époux. Elle pleura dès que Jordan lui "passa très lentement la main dans les cheveux."

 

Le lendemain, "au réveil, elle était évanouie." Le docteur, qui vint à son chevet, ne comprit pas la raison de son mal. Le jour d'après, une anémie fut diagnostiquée, mais le médecin n'en comprenait pas l'origine.

 

L'état d'Alicia s'aggrava. Elle eut d'abord quelques hallucinations. Une nuit, "elle s'immobilisa subitement, le regard fixe." Puis elle se mit à hurler. Son mari parvint à la calmer.

 

Les hallucinations se poursuivirent. Les médecins consultés ne purent que constater la dégradation de son état. Il n'y avait plus rien à faire.

 

"Alicia continua de s'éteindre dans son délire anémique qui s'aggravait le soir, mais régressait toujours en début de matinée."

 

 Elle sombra inexorablement. Quand elle perdit connaissance, elle délira à mi-voix. Son mari faisait les cent pas discrètement.

 

Elle mourut.

 

Lorsque la bonne entra dans la chambre de la défunte pour défaire le lit, elle aperçut des taches de sang sur la taie et appela Jordan. Quand la bonne souleva la taie, elle la lâcha immédiatement et resta interdite ! Jordan demeura surpris mais demanda à la bonne ce qui se passait.

 

Ayant compris que l'oreiller était lourd, Jordan le ramassa avec la bonne. Puis il découpa la taie et la doublure.

 

Au milieu des plumes qui volèrent, Jordan et la bonne virent "une bête monstrueuse, une boule vivante et visqueuse. Elle était tellement enflée que sa bouche apparaissait à peine."

 

Ainsi, nuit après nuit, alors qu'Alicia était alitée, la bête était parvenue à vider la jeune femme de son sang.

 

"Ces parasites d'oiseau, minuscules en milieu naturel, parviennent à acquérir dans certaines conditions des proportions énormes. Le sang humain semble leur être particulièrement favorable, et il n'est pas rare d'en trouver dans les oreillers de plumes."

 

FIN DE LA DEUXIÈME PARTIE

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29 janvier 2010 5 29 /01 /janvier /2010 10:47

Source

 

QUIROGA Horacio, Contes d'amour, de folie et de mort, Éditions Métailié, Coll. Suites, 2000

 

En 1917, Horacio Quiroga réunit, en vue de la publication d'un recueil, les contes qu'il a rédigés ces quinze dernières années. L'amour, la folie et la mort font partie de son univers. Tous trois ont marqué sa vie. La mort surtout… Le père d'Horacio Quiroga, son beau-père et son épouse se sont suicidés.

 

La forêt occupe aussi une place importante dans quelques-uns de ces contes. Elle apporte souvent la mort, l'homme n'étant pas toujours en état de lutter contre elle. C'est sans doute dans ce lieu que se trouvent les limites de l'homme.

 

Ces contes sont souvent très courts, mais chaque histoire est poignante… Les voici !

 

TEXTE

 

La poule égorgée

"Toute la journée, assis dans la cour, les quatre enfants idiots des Manzzini-Ferraz se tenaient sur un banc." Ils ne faisaient qu'imbiber leur pantalon de salive. Ces enfants, dont l'aîné était âgé de douze ans et le plus jeune de huit ans, avaient pourtant fait la joie de leurs parents.

 

Après quatorze mois de mariage, un fils vint au monde. "Mais à l'âge de vingt mois, il fut pris une nuit de convulsions terribles et au matin il ne reconnaissait plus ses parents." Le médecin ne put rien pour lui. L'enfant devint idiot.

 

Berta, la mère, fut désespérée. Son mari fut plus attentionné. Le couple eut un autre enfant, mais à dix-huit mois, il connut le même sort que son aîné.

 

Les parents furent une fois encore meurtris, leur amour était maudit pensaient-ils !

 

Ils eurent des jumeaux qui connurent le même sort que les deux premiers.

 

Malgré tout, "[…], il restait à Mazzini et à Berta une grande compassion pour leur quatre enfants."

 

Au bout de quelques années, ils voulurent un autre enfant qui tarda à venir. Cette situation les aigrit, ils se dirent des choses blessantes. Puis une fille vint au monde.

 

Pendant deux ans, ils craignirent pour elle. Puis Bertita, leur dernière née, grandit normalement. Elle devint source de joie pour les deux parents qui délaissaient quelque peu les quatre autres enfants.

 

Mais le couple n'était pas apaisé. La peur de perdre cette fille était toujours dans leur pensée. Une tension était, la plupart du temps, perceptible, chacun estimant que les quatre avortons étaient la faute de l'autre. C'est pourquoi, "avec de tels sentiments, il n'y eut plus d'affection possible pour les quatre aînés. La bonne les habillait, leur donnait à manger, les couchait, avec une brutalité manifeste."

 

Les parents fêtèrent les quatre ans de leur fille, mais "l'enfant eut quelques frissons et un peu de fièvre."  La peur de ce qui pouvait arriver à l'enfant leur fit tenir des propos blessants. Puis quand le matin arriva, "sa légère indigestion avait disparu et, comme dans tous les jeunes ménages qui se sont aimés intensément ne serait-ce qu'une fois, la réconciliation vint fatalement, avec autant plus d'effusions que les injures avaient été infâmes."

 

Les parents allèrent se promener et demandèrent à la bonne de tuer une poule. Ce que fit la bonne sous les yeux des quatre idiots.

La bonne demanda à la mère de faire sortir les quatre enfants de la cuisine. Ils allèrent "choir sur un banc."

 

Après le déjeuner, les parents partirent se promener avec leur fille, la bonne, quant à elle, se rendit à Buenos Aires.

 

Tandis que les parents se trouvaient chez un ami, leur fille s'échappa et retourna à la maison. Les autres enfants avaient passé la journée sur le banc.

 

La jeune fille, sous le regard des quatre idiots, parvint à trouver les objets nécessaires pour se hisser sur la crête du mur. Soudain, les quatre enfants, dont le regard s'était animé, avancèrent doucement vers le mur et attrapèrent leur sœur prête à se hisser sur le mur. La jeune fille cria.

 

"L'un d'entre eux lui serra le cou en séparant ses boucles comme s'il s'agissait de plumes, et les autres la traînèrent par une jambe jusqu'à cuisine."

 

Le père qui crut avoir entendu la voix de sa fille, sortit de chez le voisin. Il appela sa fille et n'eut droit qu'à un silence pesant. "Mais en passant devant la cuisine, il vit sur le sol une mer de sang. Il poussa violemment la porte entrouverte et lança un cri d'horreur.

Berta, que l'appel angoissé du père avait fait accourir, l'entendit crier et cria à son tour."

 

Elle n'aperçut que le sang sur le sol, puis elle s'effondra "avec un soupir rauque le long de son mari."

 

 

Les bateaux suicides

 

"Il est peu de choses plus terribles que de rencontrer en mer un navire abandonné." Ces navires vont là où le vent et les courants les emmènent. Si ces navires errants finissent par disparaître, de nouveaux arrivent.

 

Si la plupart du temps, le navire est abandonné à cause de tempêtes ou d'incendies, il arrive parfois que la raison soit tout autre.

 

Ainsi le Maria Margarita connut un destin peu banal. Après avoir levé l'ancre, "à New York le 24 août 1903, […] il prit contact avec une corvette."

 

Le paquebot contacté n'obtenant pas de réponse du Maria Margarita, se rendit sur place en chaloupe. " Sur le navire, il n'y avait personne. Les chemises des marins séchaient à la proue. Le fourneau était encore allumé. […] Aucun indice de lutte ou de panique."

 

Ce récit avait été fait par le capitaine auprès duquel voyageait le narrateur. Les gens, qui étaient sur le bateau, demandèrent un autre récit à l'un des passagers.

 

Un passager, qui avait voyagé sur les mers du Nord, avait rencontré un bateau semblable à celui du Maria Margarita. Leur bateau s'était approché d'un autre visiblement abandonné. Quelques hommes de l'équipage s'étaient rendus sur le bateau qui était vide et en ordre. Huit hommes étaient restés à bord de ce bateau, ce qui permit aux deux navires de voyager ensemble.

 

Mais deux jours après, les huit hommes avaient disparu. "La terreur superstitieuse" s'empara alors des hommes. Cependant, "six hommes [avaie]nt trouvé le courage d'aller remplir le vide." Le passager, qui rapporte ce récit, accompagna ces hommes.

 

À bord, les hommes burent pour chasser la peur. "Tous s'étaient levés ; ils déambulaient et n'avaient plus envie de parler."

 

Soudain, l'un des hommes, après avoir ôté sa chemise, s'approcha du bord du bateau et se jeta à l'eau.

Les autres hommes ont tourné la tête en entendant le bruit, puis ont oublié cela "pour retomber dans l'apathie générale."

 

L'un après l'autre, les hommes se sont jetés à la mer. Le narrateur est resté seul "à regarder comme un idiot la mer déserte."

 

Le récit achevé, une question  fut posée. Qu'avait donc ressenti le narrateur ? "Au lieu de [s'] épuiser à [se] défendre à tout prix, angoissé, contre ce qu'[il] ressentai[t], ainsi que tous ont dû le faire, […], [il a] accepté simplement cette mort hypnotique, comme s' [il] étai[t] déjà annulé."

 

Cette réponse ne convainquit pas le capitaine qui vit en lui un farceur. "Au contraire, dit un passager malade qui rentrait chez lui pour mourir dans son pays. Si c'était un farceur il n'aurait pas cessé d'y penser et il se serait aussi jeté à l'eau."

 

FIN DE LA PREMIÈRE PARTIE

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